Ça peut sembler bizarre, mais j’aime chasser. Je n’y aurais jamais pensé avant de m’y mettre. C’est l’un de ces trucs qu’on ne sait pas que l’on va apprécier avant d’y être plongé jusqu’au cou. Je n’aurais jamais cru l’apprécier, mais voilà c’était rendu que je m’éloignais de tout le monde pour aller chasser en paix. Il y avait quelque chose de paisible à marcher dans la forêt en silence. Se concentrer sur les signes de la nature pour trouver une proie. Mon arc tendu à moitié entre les mains, je cherchais quelque chose à ramener à manger. J’entends les buissons se secouer et je me retourne pour voir une créature velue noire en sortir. Enfin, noire jusqu’à ce que j’aperçoive les lignes blanches sur son dos. Un gros mot s’échappe de mes lèvres alors que je recule de quelques pas de peur de me faire arroser par la créature que je reconnais comme étant une moufette. On se regarde dans les yeux et ni elle ni moi ne bougeons. Je recule d’un pas de plus en la regardant, et elle s’active. Je me force à me figer. Il n’y a rien à faire, nous sommes dans une impasse. C’est elle ou c’est moi. Je finis de tendre mon arc et vise la tête de la créature. Je lâche la flèche et elle s’enfonce dans la tête de la créature. Malheureusement pour moi, elle est intelligente et elle réalise ce qu’il va se passer. Dans un dernier effort pour sa survie, un nuage de puanteur s’échappe de son derrière et me heurte de plein fouet. Je dois poser une main sur mes lèvres pour m’empêcher de me vider. Une fois que je me suis habitué à l’odeur, enfin autant que cela soit possible, je m’approche de la moufette. Elle est couchée sur le côté sans bouger. Je m’assure qu’elle est réellement morte en lui donnant un coup de pied dans le flanc. Je me détends en remarquant qu’elle ne bouge plus. Et voilà, qu’est-ce que je fais avec ça. C’est le visage de Caelan qui apparait à mon esprit, et un sourire apparait sur mes lèvres alors que je me rappelle que son anniversaire est bientôt. J’attrape la chose par la queue et retourne d’où je suis arrivé. Je me dirige vers le village de Marae là où je sais que Caca habite. Elle doit probablement me sentir à quinze kilomètres, mais je me rends quand même jusqu’à sa hutte, emmenant toute ma puanteur à l’intérieur avec moi. Je lance la moufette, qui a toujours la flèche dans la tête, sur le sol à côté d’elle. « Joyeux anniversaire Caca! »

Je sais que je suis en avance, je ne suis pas stupide. Disons simplement que j’avais saisit l’opportunité quand elle s’était présentée. Ce n’était pas tous les jours que j’avais la chance (ou la malchance) de croiser le chemin d’un putois. C’était encore moins fréquent que je ne me vois forcé d’en tuer un. Je savais que Caelan avait eu cet étrange meilleur ami du nom de Fluffy Muffin Margarita… un écureuil empaillé qu’on m’avait dit. Je ne voulais pas savoir comment c’était arrivé ou pourquoi elle trouvait que c’était mignon. Tout ce que je savais c’était que la perte de muffin la pesait. Comment je le savais? Eh ben, elle me l’avait dit tout simplement. Et contrairement à ma tête, j’étais capable d’écouter, plutôt bien même. Et ma mémoire n’était pas mauvaise non plus. Donc quand j’avais tapé dans la bête pour m’assurer de sa mort, j’avais tout de suite pensé à la petite asiatique irlandaise. Bref, je lui balance son cadeau comme le gentleman que je suis avant de m’asseoir à l’entrée de sa tente. Faut dire que j’ai conscience que je schlingue tellement qu’on doit me sentir jusqu’à New York, et que je doute qu’elle apprécie de partager un si petit espace avec mon odeur. « Je ne compte jamais sur toi pour cuisiner quoi que ce soit. » Parce que je tiens à la vie. Je suis loin d’être suicidaire même si on pourrait parfois croire le contraire. Caelan a du mal à cueillir des coquillages sans se noyer alors je ne lui ferais pas confiance pour deux sous avec un couteau. « C’est un remplacement… pour Muffin… » Parce que le nom complet, je refuse de le dire. C’est trop… trop. Vous voyez ce que je veux dire? Enfin tant pis si vous ne comprenez pas, ça n’est pas si grave que ça. J’attrape la flèche qu’elle me tend, et je la garde loin des autres. Hors de question qu’elle rejoigne mon carquois sans qu’elle ne soit lavée soigneusement avant. Mes sourcils se soulèvent quand elle me dit que je pue. J’affiche une moue choquée avant de m’approcher vers elle, l’emprisonnant dans mes bras pour un câlin puant. « Faudra que tu m’aide à me débarrasser de l’odeur, parce que tu pues toi aussi! » Je lui offre un sourire moqueur, fier de mon coup.