~ Sans doutes est-ce que Karl ne pouvait pas deviner, réellement, en cet instant, le plaisir que pouvait ressentir Mississippi depuis l'instant où elle l'avait eu dans son champ de vision. A vrai dire, pour cette austère femme, criminelle et hostile à l'homme, cela pouvait sembler étrange : Mais c'était toujours très positivement qu'elle accueillait ce fils de cœur auprès d'elle, de toute la sincérité dont elle était encore capable. Évidemment, cette intensité ne pouvait jamais se lire dans les mots, mais les regards qu'elle pouvait parfois lui porter, sous sa froideur chronique, ne faisaient alors que témoigner de son honorable affection pour ce jeune homme atypique. De caractères pourtant bien différents, ils s'étaient étrangement bien trouvés, et chacun de leurs échanges était à présent enthousiasmant pour l'esprit d'ordinaire bien radical et terrible de cette sorcière de glace.

Les regards de Karl, justement, ne pouvaient qu'amuser intérieurement la grande femme, tandis qu'il lui offrait quelques mines boudeuses, de temps à autre. Oh, oui, elle savait bien qu'il détestait se faire examiner de la sorte, telle une bête de foire, et se voir ainsi confronté aux faiblesses qui avaient pu passer dans sa vie. Mais, d'un système affectif plutôt étrange, Mississippi était comme ça, et appréciait tout particulièrement ces échanges peu conventionnels avec ce fils sentimentalement adopté : S'il n'aimait pas ainsi passer entre ses doigts fins et froids, elle en prenait tout de même le droit, non sans légèrement sourire des ressentis qui pouvaient traverser l'esprit du jeune homme. Mississippi savait bien, pourtant, qu'il avait souffert, ça oui. Elle savait même, quelle frustration il avait pu avoir, lors de sa convalescence. Mais cela, finalement, ne changeait pas grand chose : la dame blanche ne mettait en valeur ces évènements que pour pousser Karl à s'en remettre. Oh, certes, cette méthode était peut-être quelque peu violente, sacrément décalée, mais cette étrange femme était ainsi, qu'il en plaise ou non à ces pauvres âmes humaines qui daignaient la côtoyer, et d'autant plus dans le cas de Karl.

Plus elle était attachée à quelqu'un – Ce qui était pourtant rare -
Plus elle se chargeait de ces quelques piques affectifs.
Plus elle s'intéressait à ses victimes,
Plus elle les faisait souffrir.
Voilà, comment son esprit était forgé,
De fer et de sang ; D'incohérences.

~

Lorsque Karl finit par prendre la parole tout en laissant entendre quelques mots à propos de sa convalescence, citant même Bryan – Qui était un ami commun, par ailleurs – Mississippi ne put s'empêcher de laisser ses sourcils se hausser légèrement, amusée. L'ombre d'un sourire put d'ailleurs se déceler au coin de ses lèvres, tandis que l'auto-dérision de Karl ne pouvait que la réconforter sur le regain de ses forces premières. En effet, il avait l'air d'avoir bien reprit sa vie en main, et, fort heureusement, sa santé, laissant même un petit rire passer d'entre ses lèvres masculines.

Sinon, moi aussi je suis ravi de vous revoir.
Mais, dites-moi...

Tiens, une question. Ne cachant pas sa curiosité, la grande femme croisa pourtant les bras, questionnant Karl d'un nouveau haussement de sourcils ainsi que d'un léger redressement de menton, accordant une parfaite expression Missisippienne à son visage pâle et creusé par la vie. Un sourire sadique ? Un air éveillé ? Une lueur sauvage au fond du regard ? Pas de doutes, son fils de cœur s'apprêtait à faire une requête qui ne devrait pas manquer de lui plaire. D'ailleurs, il ne tarda pas, déchirant la feuille qu'il tenait entre les doigts en quelques morceaux, d'une criminelle douceur, soulignant ses paroles.

Accepteriez-vous de m'accorder une chasse ?
En mémoire des personnes que nous avons fait souffrir ensemble...
En mémoire du plaisir de tuer...
En mémoire de ce plaisir partagé...
En mémoire du bon vieux temps...
Vous souvenez-vous de ces moments ?
Impossible de les oublier...
Impossible de les effacer...
Impossible de les occulter...
Parce que tels étaient nos jeux.

Les sourcils de Mississippi se rabaissant en une expression lumineuse de satisfaction, ne cachant alors pas ses affinités sadiques et ses pulsions de torture et de vice sanguinaire, la grande femme laissa un sourire s'étaler sur son visage émacié, partageant sans mal cette terrible expression que lui offrait son fils. Pinçant un instant ses lèvres pâles entre elles, elle décroisa finalement les bras avant de déposer son index sur la bouche de Karl, continuant, d'une voix accordée :

« Rien ne me ferait plus plaisir que de partager de tels instants avec toi, tu le sais bien, Karl~ »


Son sourire s'étalant encore légèrement – Si cela était possible – elle ramena finalement sa main à elle, marquant un pas en arrière, avant de sortir, d'entre les plis de sa robe, deux de ses multiples armes, hostiles à l'homme. Impressionnante et victorieuse, elle les afficha royalement, comme soupesant le pour et le contre, haussant ses sourcils en une terrible expression de digne criminelle, amusée de la violence, de la torture à l'état pur, du sang versé. Une question, vint alors s'ajouter, en une terrible mélodie :

« Je te fais l'honneur de décider des règles, mon fils. Quelles seront nos limites, en cette journée bien funeste mais non moins plaisante ? »


Son humour noir, Karl le connaissait bien. Mississippi se riait déjà, des hurlements qui leur seraient offerts. Dans sa main droite, son fameux revolver brillait d'une intensité déroutante, comme directement rallié à la cruauté de sa maitresse – Les armes à feu étaient d'ailleurs très rares sur l'ile, la plupart ayant étés détruites lors des divers crashs... Donnant à Mississippi un trésor d'une terrible satisfaction, le privilège de ce sombre choix – tandis que sa main gauche mettait en valeur un poignard de fer et de pierre.

Quelles, étaient leurs limites ?
Quelles étaient les règles ?
Autoriserait-il le port du canon de l'arme,
Ou demeureraient-ils rivés sur leurs intenses lames ?

Nous nous retrouvons enfin,
Mon fils,
Tous deux alliés,
Pour leur plus grand malheur.
Bénédiction.
♥

This could really be a good life...